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Enseigner (1) – Enseigner ou publier, il faut choisir !

18 Octobre 2011 , Rédigé par profignoble Publié dans #Enseigner

Bonjour à tous,

 

Je voudrais aujourd’hui aborder la question des cours. Il est parfois malaisé d’expliquer à certains de nos concitoyens que nous effectuons un service de 192 h de cours annuel. Par un raccourci qui témoigne de leur ignorance, ils pensent que notre travail se limite à nos seules heures de cours. Il y a quelques années, ce n’était pas faux pour nombre de collègues qui se complaisaient dans ces seules tâches. Avec le temps, les choses ont heureusement changé.

 

Aujourd’hui, la compétition internationale toujours plus féroce nous oblige à nous concentrer sur l’excellence internationale. Les publications internationales valent aujourd’hui très chères pour l’université. Il n’est donc pas rare (et sans fausse modestie, j’avoue en faire partie) que les universités proposent de décharger les enseignants-chercheurs d’excellence d’une partie de leur service pour qu’ils se consacrent mieux et plus longtemps à leur recherche. C’est seulement grâce à de telles incitations que j’ai accepté de rester en France alors que plusieurs pays étrangers se proposaient de m’accueillir. C’est aussi à ce prix que nous remontons dans le classement de Shanghai depuis quelques années maintenant !

 

Pourtant, ces décharges sont parfois insuffisantes. Faire quelques heures de cours exige de nous du temps ; et parfois, quand une publication est imminente, le temps nous est compté et on peut plus faire cours. Mes activités de publication étant ce qu’elles sont (je ne vais pas m’en excuser !), cela m’arrive assez régulièrement comme vous pouvez vous en douter. C’est pourquoi, je n’hésite pas à demander à mes doctorants de me remplacer, certains s’en sortant d’ailleurs très bien. Je profite d’une législation qui limite drastiquement le nombre d’heures de cours qu’ils peuvent faire. De la sorte, les heures qu’ils effectuent sont comptées sur mon service. Des esprits chagrins y verront une forme d’exploitation de mes doctorants. De mon côté, j’y vois trois avantages en me plaçant du strict intérêt des doctorants :

 

  • 1.  Il s’agit tout simplement de les intéresser à l’excellence de leur encadrement de thèse. Si, plus tard, ils bénéficieront du prestige associé à mon nom, il faut bien qu’ils y contribuent. Je pourrais d’ailleurs m’analyser comme un phénomène marketing. Mon nom est aujourd’hui une marque, un gage de qualité dont ils bénéficieront plus tard. Quoi de plus normal pour eux d’aider cette marque à prospérer !

 

  • 2.  Ensuite, cela permet aux doctorants de se former au plus haut niveau. D’habitude cantonnés aux cours en licence, ils découvrent les cours de master qui demandent des connaissances approfondies. Si ces cours leur demandent du travail, ils pourront ajouter ces quelques lignes à leur CV, facilitant encore une fois leur placement.

 

  • 3.  Le dernier avantage est peut-être le plus complexe à expliciter. Quand on atteint mon niveau d’excellence, faire cours m’expose à la médiocrité des étudiants, même en master. Combien d’horreurs n’ai-je entendues en cours, à même de me faire tendre vers une médiocrité, si éloignée de l’excellence ? En me remplaçant, mes doctorants m’évitent simplement de déchoir, de m’abaisser à un niveau tel que mon excellence ne saurait s’en relever.

 

Vous surprendrais-je si je vous confie qu’aucun de mes doctorants ne s’en est jamais plaint, la plupart n’hésitant pas à me remercier de leur offrir cette opportunité ? Voilà bien un démenti à ces professeurs, soi-disant proches de leurs doctorants, qui m’accusent, avec une mauvaise foi évidente, d’exploiter mes doctorants !

 

Le génie est un fardeau pour qui en est doté tant la masse est ignare.

 

Le professeur ignoble

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K
<br /> Il faut Monsieur le professeur Ignoble, souligner un méfait bien plus terrible encore des remises en causes intempestives des cadres théoriques reconnus. Lorsqu'on se donne pour but de remettre en<br /> cause les cadres existants on favorise une véritable insécurité ontologique dans la discipline. Cette insécurité nuit aux jeunes collègues qui se voient obligés de perdre leur temps à comprendre<br /> des débats théoriques superflus et pire encore, elle nuit à l'image même de la science. Comment voulez-vous que la connaissance se transmette dans la sphère économique s'il s'avère qu'il n'y a pas<br /> de consensus parmi les scientifiques ? Ce problème peut paraître anodin, mais une science qui n'est pas apte à fournir des réponses à la société qui la nourrit perd sa raison d'être...<br /> <br /> <br />
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C
<br /> Cette utilisation de ses doctorants permet d'ailleurs au prof ignoble d'avoir des activités annexes plus rémunératrices encore ou plus distrayantes, telles que des activités de conseil et d'audit,<br /> qu'il donne à faire à ses doctorants dailleurs ou la publication d'un blog pour faire sa promotion personnelle !!<br /> <br /> <br />
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