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Lost in transportation

16 Février 2012 , Rédigé par profignoble Publié dans #Divers

Bonjour à tous,
 
Ce matin, je dois avouer que j'ai une fois de plus risqué ma vie pour venir jusqu'à vous. J'en ai encore les mains qui tremblent. Mon chauffeur particulier, Alfred (qui me dit que ce n'est pas son vrai prénom, que j'ignore par ailleurs), n'était pas en bas de mon immeuble ce matin. La grippe, soi-disant... J'aurais dû me méfier de lui. En 20 ans que l'Université l'emploie, c'est la première fois qu'il manque à l'appel. Le fourbe, m'avoir ainsi poignardé après que je lui ai accordé ma confiance durant ces longues années. Enfin, je suis bien content d'avoir oublié ses étrennes...
 
J'ai donc dû venir par mes propres moyens. La dernière fois que j'ai pris le métropolitain, c'était en 1971, pour semer Belle-Maman. Il faut dire qu'à l'époque, mes méthodes d'encadrement des doctorantes n'étaient pas aussi bien acceptées qu'aujourd'hui (Mes réponses à vos questions (2)) - on a toujours tort d'avoir raison trop tôt.

Quelle ne fut pas ma surprise en descendant les escaliers du "métro" : comme tout ce qui part à vaux-l'eau, ce prétendu service public a lui aussi changé. Rendez-vous compte, il n'y a plus de première classe depuis 1991 ! Et personne ne m'a laissé sa place assise...
 
Derrière le guichet, une dame fort mal aimable m'a ri au nez lorsque je lui ai demandé comment il fallait faire pour entrer. Après avoir noté son nom (je suis toujours prompt à aider d'autres services publics), j'ai immédiatement appelé une des doctorantes que j'oblige à loger près de chez moi - c'est plus pratique, convenons-en, pour un suivi de qualité. Elle m'a ainsi expliqué "la procédure". Après lui avoir demandé de me donner un ticket, je l'ai congédié en la menaçant vertement de tout commentaire sur cette histoire. J'ai enfin voyagé - avec le commun. Bizarrement, personne ne m'a accosté - la retenue ou l'admiration sans doute.
 
Je suis sorti une station plus tard. Le bruit, l'odeur
 (Jacques Chirac avait lui aussi raison trop tôt !), la promiscuité subie (j'avais pourtant trouvé une place intéressante près d'une jeune femme charmante aux formes généreuses qui ont passablement amorti ma chute à l'arrêt brutal du wagon), les conversations aberrantes (chacun se croit visiblement autorisé à dire ce qui lui passe par la tête en considérant que c'est intéressant), la musique assourdissante qui jaillit du casque de jeunes pubères abrutis, l'étalage de cette mauvaise presse gratuite (j'ai été tenté de laisser mon Figaro ou mon dernier article de recherche sur un siège afin de relever le niveau, mais que voulez-vous, de la confiture donnée à des cochons), tous ces désagréments m'ont souillé les yeux, les oreilles et l'esprit, je n'en pouvais plus... Heureusement que j'étais arrivé à la faculté. C'est quand même pratique ces logements de fonction proches de votre lieu de travail.
 
En arrivant devant l'université, je me suis aperçu que je ne savais pas quelle entrée emprunter. J'arrive toujours par le parking où je prends l'ascenseur réservé aux Professeurs. J'ai habilement rusé en suivant un troupeau d'étudiantes. Lorsque je me suis retrouvé dans une salle remplie de canapés, de musique que nous qualifierons sobrement de tribal-contemporaine et d'étudiants consommant de l'alcool, j'ai décidé que j'avais suivi trop longtemps ce groupe (noter de récupérer le local pour des Sessions individuelle d'Introduction à la Recherche pour les Cinquième année - mes fameux SIRC®, première étape du long rite de passage d'inscription en thèse avec moi). J'ai finalement réussi à m'enfermer dans mon bureau où j'ai encore perdu 20 minutes à faire la note de frais de mon déplacement en métro. Ce soir, je prends le taxi.

 

Le génie est un fardeau pour qui en est doté tant la masse est ignare

 

Le professeur ignoble

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